La branche de cerisier
J’ai trouvé ce matin, dans la petite allée
Qui mène droit à ma maison,
Une branche fleurie et qu’on avait foulée,
Tapie en un creux de gazon.
J’écartai doucement les brindilles légères
Qui la cachaient, et sous mon pied
J’ai vu – pauvres fleurs éphémères –
Une branche de cerisier.
Depuis deux jours, peut-être, elle était là , meurtrie ;
Et ses légers pétales blancs
Etaient flétris, souillés d’une terre noircie.
Je l’ai prise en mes doigts tremblants,
Et je suis revenue à pas lents vers ma chambre.
L’air était vif et le soleil
Mettait devant mes pas des taches couleur d’ambre
Et rendait mon teint plus vermeil.
Dans un vase de fine et blanche porcelaine,
J’ai déposé les humbles fleurs.
Un rayon de soleil vint de sa tiède haleine
Ranimer un peu leurs couleurs.
Et j’ai pu voir alors les tremblantes fleurettes,
Qui tout à l’heure allaient mourir,
A la fraîcheur de l’eau dresser un peu leurs têtes,
Et puis enfin s’épanouir.
*
* *
Si je rencontre un jour une âme triste et lasse,
Mon cœur sera pris de pitié,
Mais je saurai dès lors ce qu’il faut que je fasse,
Car je n’aurai pas oublié
. . . . .
Mes pauvres fleurs de cerisier.
“Eglantine charentaise”, U.N. (Union Noëliste)
Revue “Le Noël” n°1438, janvier 1923